Quelle est la différence entre les hydrocarbures conventionnels et non-conventionnels ?

CAPSULE ÉNERGÉTIQUE

La définition qui suit s’applique aussi bien au pétrole qu’au gaz naturel.  On utilisera donc souvent le terme générique ‘hydrocarbure’ pour désigner les deux formes de combustibles.

PÉTROLE (OU GAZ) CONVENTIONNEL :

Les hydrocarbures formés au niveau de la roche-mère migrent vers une roche poreuse et perméable  appelée roche-magasin ou réservoir.  Ce déplacement est dû aux pressions élevées dans la roche-mère qui se situe en plus grande profondeur.  De plus, pour que se crée un réservoir de pétrole conventionnel, il faut qu’une roche imperméable recouvre le réservoir et empêche ces fluides de remonter vers la surface.  Autrement, soit que ces hydrocarbures sont éliminés par les microorganismes, soit qu’ils se mélangent avec l’argile et le sable de surface pour former des sables bitumineux.

L’accumulation et la formation de ces réservoirs d’hydrocarbures ont pris des centaines de millions d’années, mais en seulement 20, 50 ou 100 ans, on peut vider ces stocks par simple forage vertical et pompage.  Jusqu’à tout récemment, c’est ce type de combustible qui a été extrait, car beaucoup plus facile et moins coûteux à sortir de terre.  (Voir capsule portant sur EROI).

Au Canada, même si la ressource est très importante, elle n’est pas exploitable totalement, loin de là.  Environ 10% de la ressource totale pourrait être extraite dans un avenir moyen et à un coût raisonnable.  De plus des dégâts écologiques importants découlent de cette exploitation.

La production actuelle est d’environ 2,3 millions de barils par jour.  Les compagnies désirent augmenter en 2040, cette  production à 5 millions de barils par jour, et ceci, principalement pour fin d’exportation.

Formation_combustibles_conventionnel_et_non

Source :   http://www.assemblee-nationale.fr/13/pdf/rap-info/i3517.pdf 

Le pétrole conventionnel a la particularité d’être différent d’une région géologique à une autre, la matière première et l’historique de la transformation de cette matière varient, ce qui fait que certains pétroles bruts contiennent plus de soufre que d’autres, ou que les chaînes moléculaires sont plutôt de type ouvertes (paraffine) ou fermées (cyclique), mais elles sont relativement semblables au niveau du processus de raffinage.  Pour les pétroles non-conventionnels lourds, comme les sables bitumineux, cette phase de raffinage devient beaucoup plus difficile, coûteuse et polluante.

La grande problématique est que les réserves d’hydrocarbures conventionnelles diminuent partout dans le monde.  Les nouvelles découvertes sont en quantité de plus en plus petite en nombre et en dimension de réservoir, comparativement à la quantité de pétrole et de gaz qui est extraite et brûlée annuellement.  Une capsule énergétique est dédiée à ce thème.

Les pays ne conservent pas de grandes quantités de stocks d’hydrocarbures dans des réservoirs hors terre.  Les réserves stratégiques sont de quelques semaines à 3 ou 4 mois tout au plus, et souvent conservées pour des fins militaires.  Ce qui est extrait du sol est vendu et consommé rapidement.

Pyramide des combustibles

Source :   IFPEN (Institut français du pétrole et des énergies renouvelables)

Dans la figure qui précède, la pointe supérieure du triangle (en jaune) représente les hydrocarbures liquides conventionnels stockés dans des réservoirs faciles à développer.  Au-dessous (en orange), on trouve les hydrocarbures non conventionnels piégés dans de mauvais réservoirs (pétroles de réservoirs compacts, “tight oil”) ou des pétroles visqueux (pétroles lourds ou extralourds “heavy oils”), voire des bitumes comme les sables bitumineux (“oil sands”).  La partie basse (en rouge) regroupe les hydrocarbures liquides non conventionnels piégés dans la roche mère : les schistes bitumineux, dans lesquels la matière organique n’a pas été suffisamment transformée pour générer des hydrocarbures, et les pétroles de schiste, non expulsés de la roche-mère.  Plus l’on se déplace vers le bas, et plus le taux de retour énergétique (EROI) diminue et plus les coûts d’exploitation augmentent.

Même si les ressources sont potentiellement plus importantes dans la partie basse du graphique, la capacité d’extraire cette ressource devient vite peu attrayante, même avec un prix élevé du pétrole sur le marché.

PÉTROLE (OU GAZ) NON-CONVENTIONNEL :

Le caractère « non-conventionnel » se distingue principalement par le processus de stockage du pétrole ou du gaz.  On peut regrouper ces combustibles en deux classes :

  1. Si les hydrocarbures restent piégés dans la roche-mère, on a alors ce qui peut être appelé du pétrole ou gaz de schiste
  2. Dans d’autres cas (sables bitumineux d’Alberta et pétroles lourds du Venezuela), le pétrole remonte en surface et n’a pas complété le processus de maturation thermique.  Il est alors très visqueux, ne permet pas une exploitation classique par forage et pompage.

Pétrole (ou gaz) de schiste

Les hydrocarbures de ce type restent dispersés dans la roche mère peu poreuse et peu perméable du bassin sédimentaire.  Pour pouvoir l’extraire il faut avoir recours à la fracturation hydraulique.

Les réserves de ce type d’hydrocarbure sont assez importantes, elles commencent à être  exploitées, mais cette exploitation entraîne de grands problèmes :

  • Le taux de retour énergétique (EROI) est relativement bas, car il faut beaucoup d’énergie pour actionner les pompes qui permettront la fracturation hydraulique
  • Le taux d’extraction de l’hydrocarbure est faible comparé au pétrole conventionnel
  • La durée de vie d’un puits est relativement courte, car la pression interne de la veine de schiste qui est mise sous contrainte baisse rapidement
  • Il est nécessaire de forer de nombreux puits dans un territoire donné du fait que la roche-mère est non perméable
  • Une grande quantité d’eau et de différents additifs (parfois jusqu’à 500 espèces chimiques) sont utilisés et ces additifs ainsi que des hydrocarbures peuvent remonter vers les nappes phréatiques ou la surface et devenir un polluant
  • Dans le cas du gaz de schiste, il est apparu que dans de nombreux puits abandonnés, du gaz naturel remonte lentement le long du tuyau de forage et fuit dans l’atmosphère pendant des périodes de temps qui peuvent être très longues.  Le méthane, principal constituant du gaz naturel a un effet de réchauffement atmosphérique 23 fois plus élevé par molécule que le CO2.  Ce gaz fugitif est très difficile à stopper sur une longue période de temps

Le pétrole de schiste est généralement assez différent du brut ordinaire et ressemble à de l’essence, sa densité étant plus faible du fait que la longueur moyenne des chaînes moléculaires est plus courte. Ce qui rend ce produit très inflammable et explosif.  La tragédie du lac Mégantic découle de cette caractéristique.

La forte concentration en sulfure d’hydrogène retrouvée dans plusieurs lieux d’extraction de pétrole de schiste, comme celui de la formation de Bakken pose des problèmes de sécurité pour les employés qui doivent manipuler ce produit lors de l’extraction, de l’entreposage ou du transport.  De plus la présence de ce produit est responsable d’une dégradation accélérée des conduites.

Les pays ayant les plus grandes réserves de pétrole de schiste sont la Russie, les États-Unis et la Chine.  Mais comme le taux de récupération de ce type de pétrole est faible, le déclin de cette source énergétique peut arriver rapidement.  Le Département de géologie des États-Unis (USGS) estime que le déclin de la production américaine pourrait être aussi tôt qu’en 2035.  Alors la question importante est :  Pourquoi faire autant d’investissement pour une ressource ayant une durée de vie si courte ?

Fracturation_Schéma_général

Schéma montrant deux cas de fracturation hydraulique, un forage vertical et un forage horizontal. L’eau sous pression provoque un réseau de fractures dans la roche que des particules solides ajoutées à l’eau empêchent de se refermer.

Source :  http://www.futura-sciences.com/planete/definitions/geologie-fracturation-hydraulique-9048/

Sables bitumineux Composition_sables_bitumineux

Les sables bitumineux sont composés ainsi :

3 à 5% d’eau
7 à 12% de bitume
80 à 85% de matières minérales (silice et argile)

La composition du bitume varie grandement en fonction de la profondeur d’enfouissement, de la présence d’eau et de métaux dans le sol.  La longueur des chaînes moléculaires est généralement comprise entre :  20 carbones (pétrole lourd)  à  100 (pétrole extra lourd)

Après extraction et première transformation des sables bitumineux pour séparer le bitume du sable et de l’eau, on obtient un mélange d’hydrocarbures sous forme de liquide dense, épais et visqueux.  Cela ressemble à de la mélasse, sans en avoir le goût.  Il est nécessaire de procéder à plusieurs autres étapes de transformation chimique pour obtenir un pétrole synthétique, donc un ajout allant jusqu’à 30 % de diluant de type benzène, corps particulièrement cancérigène.  Cette dilution est nécessaire pour permettre de diminuer la viscosité du pétrole et ainsi le faire circuler dans des pipelines.

Le procédé d’extraction du pétrole par excavation nécessite environ 2 tonnes de minerais de sables bitumineux pour produire 1 baril de pétrole.  De plus, il faut entre  3 et 5 barils d’eau pour produire 1 baril de pétrole.  Toutes ces manipulations sont très énergivores, ce qui fait qu’environ 25% de l’énergie contenue dans un baril de pétrole est nécessaire pour produire un baril issu des sables bitumineux, contre 6% pour le pétrole conventionnel, taux de retour énergétique très bas.

Deux régions dans le monde possèdent la majorité des ressources de sables bitumineux : le Canada et le Venezuela.  La présence de ces combustibles pèse lourd sur l’économie de ces pays.  Ils imposent une structure économique très dépendante du prix international de cette ressource, prix qui a grandement fluctué selon les années, et si trop d’importance est mise sur cette ressource, cela nuit au développement des filières d’énergie renouvelable, car l’investissement pour mettre en production ce type d’hydrocarbure est beaucoup plus élevé que pour le pétrole conventionnel.

Réserves_pétrole_sables_bitumineux

Au Canada, même si la ressource est très importante, elle n’est pas exploitable totalement, loin de là.  Environ 10% de la ressource totale pourrait être extraite dans un avenir moyen et à un coût raisonnable.  De plus des dégâts écologiques importants découlent de cette exploitation.

La production actuelle est d’environ 2,3 millions de barils par jour.  Les compagnies désirent augmenter en 2040, cette  production à 5 millions de barils par jour, et ceci, principalement pour fin d’exportation.

 

 

 

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